René Descartes
Discour de la méthode p6
Ensuite de quoi, faisant réflexion sur ce que je doutois, et que
par conséquent mon être n'étoit pas tout parfait, car je voyois clairement
que c'étoit une plus grande perfection de connoître que de douter, je m'avisai
de chercher d'où j'avois appris à penser à quelque chose de plus parfait que
je n'étois; et je conclus évidemment que ce devoit être de quelque nature qui
fût en effet plus parfaite. Pour ce qui est des pensées que j'avois de
plusieurs autres choses hors de moi, comme du ciel, de la terre, de la lumière,
de la chaleur, et de mille [160] autres, je n'étois point tant en peine de
savoir d'où elles venoient, à cause que, ne remarquant rien en elles qui me
semblât les rendre supérieures a moi, je pouvois croire que, si elles étoient
vraies, c'étoient des dépendances de ma nature, en tant qu'elle avoit quelque
perfection, et, si elles ne l'étoient pas, que je les tenois du néant, c'est-à-dire
qu'elles étoient en moi pourceque j'avois du défaut. Mais ce ne pouvoit être
le même de l'idée d'un être plus parfait que le mien : car, de la tenir du néant,
c'étoit chose manifestement impossible; et pourcequ'il n'y a pas moins de répugnance
que le plus parfait soit une suite et une dépendance du moins parfait, qu'il y
en a que de rien procède quelque chose, je ne la pouvois tenir non plus de
moi-même : de façon qu'il restoit qu'elle eût été mise en moi par une
nature qui fut véritablement plus parfaite que je n'étois, et même qui eût
en soi toutes les perfections dont je pouvois avoir quelque idée, c'est à
dire, pour m'expliquer en un mot, qui fût Dieu. A quoi j'ajoutai que, puisque
je connoissois quelques perfections que je n'avois point, je n'étois pas le
seul être qui existât (j'userai, s'il vous plaît, ici librement des mots de
l'école); mais qu'il falloit de nécessité qu'il y en eût quelque autre plus
parfait, duquel je dépendisse, et duquel j'eusse acquis tout ce que j'avois :
car, si j'eusse été seul et indépendant de tout autre, en sorte que j'eusse
[161] eu de moi-même tout ce peu que je participois de l'être parfait, j'eusse
pu avoir de moi, par même raison, tout le surplus que je connoissois me
manquer, et ainsi être moi-même infini, éternel, immuable, tout connoissant,
tout puissant, et enfin avoir toutes les perfections que je pouvois remarquer être
en Dieu. Car, suivant les raisonnements que je viens de faire, pour connoître
la nature de Dieu, autant que la mienne en étoit capable, je n'avois qu'à
considérer, de toutes les choses dont je trouvois en moi quelque idée, si c'étoit
perfection ou non de les posséder; et j'étois assuré qu'aucune de celles qui
marquoient quelque imperfection n'étoit en lui, mais que toutes les autres y étoient:
comme je voyois que le doute, l'inconstance, la tristesse, et choses semblables,
n'y pouvoient être, vu que j'eusse été moi-même bien aise d'en être exempt.
Puis, outre cela, j'avois des idées de plusieurs choses sensibles et
corporelles; car, quoique je supposasse que je rêvois, et que tout ce que je
voyois ou imaginois étoit faux, je ne pouvois nier toutefois que les idées
n'en fussent véritablement en ma pensée. Mais pourceque j'avois déjà connu
en moi très clairement que la nature intelligente est distincte de la
corporelle; considérant que toute composition témoigne de la dépendance, et
que la dépendance est manifestement un défaut, je jugeois de là que ce ne
pouvoit être [162] une perfection en Dieu d'être composé de ces deux natures,
et que par conséquent il ne l'étoit pas; mais que s'il y avoit quelques corps
dans le monde, ou bien quelques intelligences ou autres natures qui ne fussent
point toutes parfaites, leur être devoit dépendre de sa puissance, en telle
sorte quelles ne pouvoient subsister sans lui un seul moment.
Je voulus chercher après cela d'autres vérités; et m'étant proposé l'objet
des géomètres, que je concevois comme un corps continu, ou un espace indéfiniment
étendu en longueur, largeur et hauteur ou profondeur, divisible en diverses
parties, qui pouvoient avoir diverses figures et grandeurs, et être mues ou
transposées en toutes sortes, car les géomètres supposent tout cela en leur
objet, je parcourus quelques unes de leurs plus simples démonstrations; et,
ayant pris garde que cette grande certitude, que tout le monde leur attribue,
n'est fondée que sur ce qu'on les conçoit évidemment, suivant la règle que
j'ai tantôt dite, je pris garde aussi qu'il n'y avoit rien du tout en elles qui
m'assurât de l'existence de leur objet : car, par exemple, je voyois bien que,
supposant un triangle, il falloit que ses trois angles fussent égaux à deux
droits, mais je ne voyois rien pour cela qui m'assurât qu'il y eût au monde
aucun triangle : au lieu revenant à examiner l'idée que j'avois d'un [163] être
parfait, je trouvois que l'existence y étoit comprise en même façon qu'il est
compris en celle d'un triangle que ses trois angles sont égaux à deux droits,
ou en celle d'une sphère que toutes ses parties sont également distantes de
son centre, ou même encore plus évidemment; et que par conséquent il est pour
le moins aussi certain que Dieu, qui est cet être si parfait, est ou existe,
qu'aucune démonstration de géométrie le sauroit être.
Mais ce qui fait qu'il y en a plusieurs qui se persuadent qu'il y a de la
difficulté à le connoître, et même aussi a connoître ce que c'est que leur
âme, c'est qu'ils n'élèvent jamais leur esprit au delà des choses sensibles,
et qu'ils sont tellement accoutumés a ne rien considérer qu'en l'imaginant,
qui est une façon de penser particulière pour les choses matérielles, que
tout ce qui n'est pas imaginable leur semble n'être pas intelligible. Ce qui
est assez manifeste de ce que même les philosophes tiennent pour maxime, dans
les écoles, qu'il n'y a rien dans l'entendement qui n'ait premièrement été
dans le sens, où toutefois il est certain que les idées de Dieu et de l'âme
n'ont jamais été; et il me semble que ceux qui veulent user de leur
imagination pour les comprendre font tout de même que si, pour ouïr les sons
ou sentir les odeurs, ils se vouloient servir de leurs yeux : sinon qu'il y a
encore cette différence, que le sens [164] de la vue ne nous assure pas moins
de la vérité de ses objets que font ceux de l'odorat ou de l'ouïe : au lieu
que ni notre imagination ni nos sens ne nous sauroient jamais assurer d'aucune
chose si notre entendement n'y intervient.
Enfin, s'il y a encore des hommes qui ne soient pas assez persuadés de
l'existence de Dieu et de leur âme par les raisons que j'ai apportées, je veux
bien qu'ils sachent que toutes les autres choses dont ils se pensent peut-être
plus assurés, comme d'avoir un corps, et qu'il y a des astres et une terre, et
choses semblables, sont moins certaines; car, encore qu'on ait une assurance
morale de ces choses, qui est telle qu'il semble qu'à moins d'être extravagant
on n'en peut douter, toutefois aussi, à moins que d'être déraisonnable,
lorsqu'il est question d'une certitude métaphysique, on ne peut nier que ce ne
soit assez de sujet pour n'en être pas entièrement assuré, que d'avoir pris
garde qu'on peut en même façon s'imaginer, étant endormi, qu'on a un autre
corps, et qu'on voit d'autres astres et une autre terre, sans qu'il en soit
rien. Car d'où sait-on que les pensées qui viennent en songe sont plutôt
fausses que les autres, vu que souvent elles ne sont pas moins vives et
expresses ? Et que les meilleurs esprits y étudient tant qu'il leur plaira, je
ne crois pas qu'ils puissent donner aucune raison qui soit suffisante pour ôter
ce doute s'ils ne [165] présupposent l'existence de Dieu. Car, premièrement,
cela même que j'ai tantôt pris pour une règle, à savoir que les choses que
nous concevons très clairement et très distinctement sont toutes vraies, n'est
assuré qu'à cause que Dieu est ou existe, et qu'il est un être parfait, et
que tout ce qui est en nous vient de lui : d'où il suit que nos idées ou
notions, étant des choses réelles et qui viennent de Dieu, en tout ce en quoi
elles sont claires et distinctes, ne peuvent en cela être que vraies. En sorte
que si nous en avons assez souvent qui contiennent de la fausseté, ce ne peut
être que de celles qui ont quelque chose de confus et obscur, à cause qu'en
cela elles participent du néant, c'est-à-dire qu'elles ne sont en nous ainsi
confuses qu'à cause que nous ne sommes pas tout parfaits. Et il est évident
qu'il n'y a pas moins de répugnance que la fausseté ou l'imperfection procède
de Dieu en tant que telle, qu'il y en a que la utilité ou la perfection procède
du néant. Mais si nous ne savions point que tout ce qui est en nous de réel et
de vrai vient d'un être parfait et infini, pour claires et distinctes que
fussent nos idées, nous n'aurions aucune raison qui nous assurât qu'elles
eussent la perfection d'être vraies.
Or, après que la connoissance de Dieu et de l'âme nous a ainsi rendus certains
de cette règle, il est bien aisé à connoître que les rêveries que nous
[166] imaginons étant endormis ne doivent aucunement nous faire douter de la vérité
des pensées que nous avons étant éveillés. Car s'il arrivoit même en
dormant qu'on eût quelque idée fort distincte, comme, par exemple, qu'un géomètre
inventât quelque nouvelle démonstration, son sommeil ne l'empêcheroit pas d'être
vraie; et pour l'erreur la plus ordinaire de nos songes, qui consiste en ce
qu'ils nous représentent divers objets en même façon que font nos sens extérieurs,
n'importe pas qu'elle nous donne occasion de nous défier de la vérité de
telles idées, à cause qu'elles peuvent aussi nous tromper assez souvent sans
que nous dormions; comme lorsque ceux qui ont la jaunisse voient tout de couleur
jaune, ou que les astres ou autres corps fort éloignés nous paroissent
beaucoup plus petits qu'ils ne sont. Car enfin, soit que nous veillions, soit
que nous dormions, nous ne nous devons jamais laisser persuader qu'à l'évidence
de notre raison. Et il est à remarquer que je dis de notre raison, et non point
de notre imagination ni de nos sens : comme encore que nous voyions le soleil très
clairement, nous ne devons pas juger pour cela qu'il ne soit que de la grandeur
que nous le voyons; et nous pouvons bien imaginer distinctement une tête de
lion entée [sic] sur le corps d'une chèvre, sans qu'il faille conclure pour
cela qu'il y ait au monde une chimère : car la raison ne nous dicte point que
[167] ce que nous voyons ou imaginons ainsi soit véritable; mais elle nous
dicte bien que toutes nos idées ou notions doivent avoir quelque fondement de vérité;
car il ne seroit pas possible que Dieu, qui est tout parfait et tout véritable,
les eût mises en nous sans cela; et, pourceque nos raisonnements ne sont jamais
si évidents ni si entiers pendant le sommeil que pendant la veille, bien que
quelque fois nos imaginations soient alors autant ou plus vives et expresses,
elle nous dicte aussi que nos pensées ne pouvant être toutes vraies, à cause
que nous ne sommes pas tout parfaits, ce qu'elles ont de vérité doit
infailliblement se rencontrer en celles que nous avons étant éveillés plutôt
qu'en nos songes.
CINQUIEME
PARTIE
Je serois bien aise de poursuivre, et de faire voir ici toute la chaîne des
autres vérités que j'ai déduites de ces premières; mais, à cause que pour
cet effet il seroit maintenant besoin que je parlasse de plusieurs questions qui
sont en controverse entre les doctes, avec lesquels je ne désire point me
brouiller, je crois qu'il sera mieux que je m'en abstienne, et que je dise
seulement en général quelles elles sont, afin de laisser juger aux [168] plus
sages s'il seroit utile que le public en fût plus particulièrement informé.
Je suis toujours demeuré ferme en la résolution que j'avois prise de ne
supposer aucun autre principe que celui dont je viens de me servir pour démontrer
l'existence de Dieu et de l'âme, et de ne recevoir aucune chose pour vraie qui
ne me semblât plus claire et plus certaine que n'avoient fait auparavant les démonstrations
des géomètres; et néanmoins j'ose dire que non seulement j'ai trouvé moyen
de me satisfaire en peu de temps touchant toutes les principales difficultés
dont on a coutume de traiter en la philosophie, mais aussi que j'ai remarqué
certaines lois que Dieu a tellement établies en la nature, et dont il a imprimé
de telles notions en nos âmes, qu'après y avoir fait assez de réflexion nous
ne saurions douter qu'elles ne soient exactement observées en tout ce qui est
ou qui se fait dans le monde. Puis, en considérant la suite de ces lois, il me
semble avoir découvert plusieurs vérités plus utiles et plus importantes que
tout ce que j'avois appris auparavant ou même espéré d'apprendre.
Mais, pourceque j'ai tâche d'en expliquer les principales dans un traité que
quelques considérations m'empêchent de publier, je ne les saurois mieux faire
connoître qu'en disant ici sommairement ce qu'il contient. J'ai eu dessein d'y
comprendre tout ce que je pensois savoir, avant que de [169] l'écrire touchant
la nature des choses matérielles. Mais, tout de même que les peintres, ne
pouvant également bien représenter dans un tableau plat toutes les diverses
faces d'un corps solide, en choisissent une des principales, qu'ils mettent
seule vers le jour, et, ombrageant les autres, ne les font paroître qu'autant
qu'on les peut voir en la regardant; ainsi, craignant de ne pouvoir mettre en
mon discours tout ce que j'avois en la pensée, j'entrepris seulement d'y
exposer bien amplement ce que je concevois de la lumière; puis, à son
occasion, d'y ajouter quelque chose du soleil et des étoiles fixes, à cause
qu'elle en procède presque toute; des cieux, à cause qu'ils la transmettent;
des planètes, des comètes et de la terre, à cause qu'elles la font réfléchir;
et en particulier de tous les corps qui sont sur la terre, à cause qu'ils sont
ou colorés, ou transparents, ou lumineux; et enfin de l'homme, à cause qu'il
en est le spectateur. Même, pour ombrager un peu toutes ces choses, et pouvoir
dire plus librement ce que j'en jugeois, sans être obligé de suivre ni de réfuter
les opinions qui sont reçues entre les doctes, je me résolus de laisser tout
ce monde ici à leurs disputes, et de parler seulement de ce qui arriveroit dans
un nouveau, si Dieu créoit maintenant quelque part, dans les espaces
imaginaires, assez de matière pour le composer, et qu'il agitât diversement et
sans ordre les diverses [170] parties de cette matière, en sorte qu'il en
composât un chaos aussi confus que les poëtes en puisse feindre, et que par
après il ne fit autre chose que prêter son concours ordinaire à la nature, et
1a laisser agir suivant les lois qu'il a établies. Ainsi, premièrement, je décrivis
cette matière, et tâchai de la représenter telle qu'il n'y a rien au monde,
ce me semble, de plus clair ni plus intelligible, excepté ce qui a tantôt été
dit de Dieu et de l'âme; car même je supposai expressément qu'il n'y avoit en
elle aucune de ces formes ou qualités dont on dispute dans les écoles, ni généralement
aucune chose dont la connoissance ne fût si naturelle à nos âmes qu'on ne pût
pas même feindre de l'ignorer. De plus, je fis voir quelles étoient les lois
de la nature; et, sans appuyer mes raisons sur aucun autre principe que sur les
perfections infinies de Dieu, je tâchai à démontrer toutes celles dont on eût
pu avoir quelque doute, et à faire voir qu'elles sont telles qu'encore que Dieu
auroit créé plusieurs mondes, il n'y en sauroit avoir aucun où elles
manquassent d'être observées. Après cela, je montrai comment la plus grande
part de la matière de ce chaos devoit, en suite de ces lois, se disposer et
s'arranger d'une certaine façon qui la rendoit semblable à nos cieux; comment
cependant quelques unes de ses parties devoient composer une terre et quelques
unes des planètes et des comètes, et [171] quelques autres un soleil et des étoiles
fixes. Et ici, m'étendant sur le sujet de la lumière, j'expliquai bien au long
quelle étoit celle qui se devoit trouver dans le soleil et les étoiles, et
comment de là elle traversoit en un instant les immenses espaces des cieux, et
comment elle se réfléchissoit des planètes et des comètes vers la terre. J'y
ajoutai aussi plusieurs choses touchant la substance, la situation, les
mouvements, et toutes les diverses qualités de ces cieux et de ces astres; en
sorte que je pensois en dire assez pour faire connoître qu'il ne se remarque
rien en ceux de ce monde qui ne dût ou du moins qui ne pût paroître tout
semblable en ceux du monde que je décrivois. De là je vins à parler particulièrement
de la terre: comment, encore que j'eusse expressément supposé que Dieu n'avoit
mis aucune pesanteur en la matière dont elle étoit composée, toutes ses
parties ne laissoient pas de tendre exactement vers son centre; comment, y ayant
de l'eau et de l'air sur sa superficie, la disposition des cieux et des astres,
principalement de la lune, y devoit causer un flux et reflux qui fût semblable
en toutes ses circonstances à celui qui se remarque dans nos mers, et outre
cela un certain cours tant de l'eau que de l'air, du levant Vers le couchant,
tel qu'on le remarque aussi entre les tropiques; comment les montagnes, les
mers, les fontaines et les rivières pouvoient [172] naturellement s'y former,
et les métaux y venir dans les mines, et les plantes y croître dans les
campagnes, et généralement tous les corps qu'on nomme mêlés ou composés s'y
engendrer : et, entre autres choses, à cause qu'après les astres je ne connois
rien au monde que le feu qui produise de la lumière, je m'étudiai à faire
entendre bien clairement tout ce qui appartient à sa nature, comment il se
fait, comment il se nourrit, comment il n'a quelquefois que de la chaleur sans
lumière, et quelquefois que de la lumière sans chaleur; comment il peut
introduire diverses couleurs en divers corps, et diverses autres qualités;
comment il en font quelques uns et en durcit d'autres; comment il les peut
consumer presque tous ou convertir en cendres et en fumée; et enfin comment de
ces cendres, par la seule violence de son action, il forme du verre; car cette
transmutation de cendres en verre me semblant être aussi admirable qu'aucune
autre qui se fasse en la nature, je pris particulièrement plaisir à la décrire.
Toutefois je ne voulois pas inférer de toutes ces choses que ce monde ait été
créé en la façon que je proposois; car il est bien plus vraisemblable que dès
le commencement Dieu l'a rendu tel qu'il devoit être. Mais il est certain, et
c'est une opinion communément reçue entre les théologiens, que l'action par
laquelle maintenant il le conserve, [173] est toute la même que celle par
laquelle il 1'a créé; de façon qu'encore qu'il ne lui auroit point donné au
commencement d'autre forme que celle du chaos, pourvu qu'ayant établi les lois
de la nature, il lui prêtât son concours pour agir ainsi qu'elle a de coutume,
on peut croire, sans faire tort au miracle de la création, par cela seul toutes
les choses qui sont purement matérielles auroient pu avec le temps s'y rendre
telles que nous les voyons à présent; et leur nature est bien plus aisée à
concevoir, lorsqu'on les voit naître peu à peu en cette sorte, que lorsqu'on
ne les considère que toutes faites.
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